LONDRES, Royaume Uni, le 10 mars 2020,-/African Media Agency (AMA)/- Cinq ans après la « disparition » du journaliste et militant pro-démocratie Itai Dzamara au Zimbabwe, on ignore toujours où il se trouve et sa famille est dans une impasse insupportable, a déclaré Amnesty International lundi 9 mars. Itai Dzamara est un militant bien connu qui critiquait ouvertement Robert Mugabe avant d’être enlevé dans un salon de coiffure le 9 mars 2015. On est sans nouvelles de lui depuis cette date.
Amnesty International est en copie d’une lettre déchirante qui a été envoyée par son épouse, Sheffra, où celle-ci demande au président Emmerson Mnangagwa de l’aider à trouver son mari et décrit la souffrance qu’elle endure en élevant ses deux enfants seule.
« Imaginez ne pas pouvoir dire à vos enfants si leur père est vivant ou mort. Quelqu’un sait où est Itai Dzamara mais a choisi d’infliger à ses proches cinq longues années d’incertitude, a déclaré Muleya Mwananyanda, directrice régionale adjointe pour l’Afrique australe à Amnesty International.
« Aujourd’hui nous nous joignons à la famille d’Itai pour appeler les autorités zimbabwéennes à mener une enquête approfondie, indépendante, efficace et transparente sur sa disparition. Les gens ne se volatilisent pas sans laisser de traces. Il faut qu’une enquête ait lieu, dont les résultats seront rendus publics, que les responsables présumés soient traduits en justice et que cessent le harcèlement et l’intimidation des militants et des critiques au Zimbabwe. »
Avant d’être enlevé, Itai Dzamara avait déjà été harcelé et roué de coups à plusieurs reprises par des membres des forces de sécurité du Zimbabwe. Amnesty International pense qu’il a été soumis à une disparition forcée en raison de son militantisme et de ses critiques véhémentes du gouvernement.
Itai Dzamara était chez le coiffeur à Glen View, une banlieue de Harare, lorsqu’il a été enlevé par cinq hommes le 9 mars 2015. Ses ravisseurs l’auraient accusé d’avoir volé du bétail avant de le menotter, de le forcer à monter dans un fourgon blanc dont les plaques d’immatriculation avaient été dissimulées et de démarrer. Il n’a pas été revu depuis, une situation qui suscite des craintes pour sa sécurité.
Itai Dzamara était un militant bien connu qui luttait pour améliorer le respect de l’obligation de rendre des comptes au Zimbabwe. Il avait appelé à la démission du président de l’époque, Robert Mugabe, et critiqué sa gestion de l’économie du pays. Ce dernier est resté à la tête du Zimbabwe pendant près de 40 ans, jusqu’à ce qu’il soit destitué en 2017 par la ZANU-PF, parti au pouvoir, avec l’appui de l’armée.
Sous la présidence de son successeur, Emmerson Mnangagwa, le Zimbabwe reste un pays où il est dangereux de critiquer les autorités. Les forces de sécurité utilisent systématiquement des textes répressifs, tels que la Loi relative à l’ordre public et à la sécurité, pour empêcher des personnes de faire des manifestations pacifiques et d’exprimer leurs opinions critiques.
Depuis qu’Emmerson Mnangagwa dirige le pays, les détracteurs du gouvernement sont de plus en plus harcelés et intimidés pour avoir exercé leur droit à la liberté d’expression et de réunion pacifique, notamment en étant poursuivis sur la base d’accusations de trahison forgées de toutes pièces.
Amnesty International engage les autorités zimbabwéennes à créer une commission d’enquête indépendante dirigée par un juge et habilitée à convoquer des témoins afin de déterminer les circonstances de l’enlèvement d’Itai Dzamara.
Les résultats de l’enquête doivent être rendus publics et les responsables présumés doivent être jugés dans le cadre de procès équitables. Toute personne disposant d’informations à soumettre à la commission doit être autorisée à le faire.
Distribué par African Media Agency (AMA) pour Amnesty International.
Complément d’information
Le président Emmerson Mnangagwa était vice-président lorsqu’il a déclaré lors de l’Examen périodique universel de l’ONU à Genève en 2016 que le gouvernement continuait de rechercher activement Itai Dzamara. Néanmoins, les autorités zimbabwéennes n’ont pas fourni de mises à jour régulières sur les actions menées pour retrouver le militant disparu, malgré une décision de justice prise en ce sens en 2016.