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Sierra Leone : Les réformes éducatives devraient tenir compte des voix des filles

Sierra Leone : Les réformes éducatives devraient tenir compte des voix des filles

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La loi nouvelle devrait exiger une meilleure inclusion des filles enceintes et des mères adolescentes

Une élève sierra-léonaise, photographiée devant le tableau d’une salle de classe de son école à Koidu (district de Kono) au Sierra Leone, le 24 novembre 2020. 
© 2020 AP Photo/Leo Correa

Freetown,SIERRA LEONE, le 9 mai 2023-/African Media Agency(AMA)/—Le gouvernement de la Sierra Leone devrait accorder la priorité aux opinions et aux expériences des filles afin de faire avancer ses réformes dans le domaine de l’éducation, ont déclaré Human Rights Watch et l’ONG Purposeful dans un rapport publié aujourd’hui. Malgré les progrès importants accomplis par le gouvernement en matière d’accès des filles à l’éducation, de nombreuses filles qui sont enceintes, vivent dans la pauvreté ou dans des zones rurales sont toujours exposées au risque d’être exclues du système scolaire.

Le 24 avril 2023, le parlement de Sierra Leone a promulgué la Loi de 2023 sur l’enseignement primaire et secondaire (Basic and Senior Secondary Education Act 2023), intégrant certains éléments de la Politique nationale sur l’inclusion radicale dans l’éducation, qui avait fait date lors de son adoption en 2021. Cette politique reconnaissait explicitement que des filles enceintes, des mères adolescentes et d’autres groupes de filles étaient systématiquement exclues de l’école. Jusqu’à 2020, le gouvernement avait officiellement exclu les filles enceintes des établissements scolaires. La Sierra Leone affiche des taux de grossesse précoce parmi les plus élevés du monde, en particulier parmi les filles qui vivent dans la pauvreté.

« La nouvelle loi sur l’éducation représente un moment historique pour l’accès des filles à l’enseignement en Sierra Leone, mais les puissants facteurs sociaux, culturels et politiques qui ont longtemps tenu les filles enceintes à l’écart du système scolaire ne changeront pas du jour au lendemain », a déclaré Chernor Bah, co-fondateur et co-président de Purposeful. « Alors que le gouvernement se félicite de son action sur les scènes nationale et internationale, nous sommes pour notre part optimistes mais aussi très prudents. Nous ne nous joindrons à ces célébrations que lorsque nous aurons eu l’assurance, de la part des filles elles-mêmes, qu’elles peuvent s’inscrire à l’école et compléter leur cycle d’éducation sans entrave ».

Human Rights Watch a mené des entretiens avec des filles et des jeunes femmes de la Province du Nord de la Sierra Leone pour ce rapport, et Purposeful y a contribué sous forme d’études, d’entretiens et d’informations tirées de son travail visant à soutenir et à autonomiser les filles, en particulier celles qui ne sont pas scolarisées, à travers le pays.

Human Rights Watch et Purposeful ont examiné les obstacles auxquels se heurtent souvent de nombreuses filles, en particulier celles qui sont enceintes ou jeunes mères, lorsqu’elles essayent d’accéder à l’enseignement. Parmi ces obstacles figurent la discrimination basée sur leur grossesse, l’ostracisme, les brimades, la pauvreté et le manque d’accès à des services de garde d’enfants. Dans leur grande majorité, les filles ont affirmé qu’elles voulaient aller à l’école et compléter leur éducation.

Non seulement la pauvreté tient les filles à l’écart du système scolaire, mais elle peut aussi être un facteur déterminant des grossesses précoces. De nombreuses filles ont affirmé qu’elles s’étaient senties sous pression ou contraintes d’avoir des rapports sexuels avec des hommes qui promettaient de leur fournir de la nourriture, des vêtements ou d’autres soutiens matériels.

Une adolescente de 17 ans, qui a eu un enfant à l’âge de 14 ans, a déclaré qu’elle avait cessé d’aller à l’école et s’était mariée après avoir appris qu’elle était enceinte. « J’allais à l’école, mais je ne recevais aucune aide [financière], donc j’ai décidé de me marier au lieu d’être réduite à vivre dans la rue », a-t-elle dit. « Je ne suis pas heureuse car l’homme ne peut pas tout fournir … et je n’ai aucune éducation ou aucun savoir-faire pour m’aider à vivre ».

Les filles et les jeunes femmes se heurtent également à des obstacles pour accéder à la contraception et recevoir des informations exactes sur la contraception.

Quand les filles vivent dans un environnement qui les soutient, il leur est plus facile de rester scolarisées, ont déclaré Human Rights Watch et Purposeful. Une adolescente de 16 ans, inscrite à l’école secondaire, a ainsi décrit le soutien qu’elle a reçu de sa conseillère : « J’étais stressée à l’idée d’aller à l’école alors que j’étais enceinte. Elle m’a encouragée. Elle m’a aussi raconté sa propre expérience quand elle est tombée enceinte alors qu’elle était écolière. [Elle] dit qu’elle a été chassée, et elle m’a encouragée [à rester] ».

Au cours de ces dernières années, le gouvernement de Sierra Leone a proclamé que l’éducation était une priorité nationale. En août 2018, il a mis en place le Programme pour une éducation gratuite de qualité, qui vise à réduire les obstacles financiers à l’accès à l’enseignement, notamment en supprimant les frais de scolarité et d’examens, tout en augmentant l’accès aux programmes régissant les cantines scolaires. Il a également accru de manière significative les dépenses publiques consacrées à l’éducation.

La Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant garantit le droit à un enseignement primaire gratuit et obligatoire. La Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant appelle les États membres de l’Union africaine à « prendre toutes les mesures appropriées pour veiller à ce que les filles qui deviennent enceintes avant d’avoir achevé leur éducation aient la possibilité de la poursuivre compte tenu de leurs aptitudes individuelles ».

« Afin d’honorer sa promesse d’ouvrir les portes des écoles à toutes les filles, le gouvernement de la Sierra Leone devrait parallèlement s’attaquer aux problèmes de la pauvreté, de la santé sexuelle et reproductive, et des risques d’exploitation », a déclaré Regina Tamés, directrice adjointe de la division Droits des femmes à Human Rights Watch. « Pour être efficace, le gouvernement devrait écouter attentivement les filles et les organisations de la société civile qui les soutiennent, afin d’apprendre directement de quoi les filles ont besoin pour aller à l’école, obtenir un diplôme et se construire ainsi un meilleur avenir. »

Distribué par  African Media Agency (AMA) pour Human Rights Watch

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