La Rapporteuse Spéciale sur la promotion et la protection du droit à la liberté d’opinion et d’expression de l’ONU Mme Irene Khan conformément à la résolution 43/3 du Conseil des droits de l’homme qui institue son mandat a adressé une communication au gouvernement togolais le 19 mars dernier afin d’obtenir des réponses sur des cas d’allégations dont elle a été saisie. Mme Irene Khan souhaitait avoir dans un délai de 60 jours selon la règlementation en vigueur, des éclairages sur « la suspension des journaux L’Alternative, Liberté et Fraternité et le retrait du récépissé du journal L’Indépendant Express suite à des articles de presse critiques, y compris à l’égard de membres du gouvernement ou de représentant étrangers dans le pays ». Deux mois après sa demande, aucune réponse ne lui a été envoyée par les autorités togolaises, d’où la publication de cette communication.
Mme Irene exprime dans sa communication adressée aux autorités togolaises que les sanctions prises contre les journalistes « ne semble pas répondre aux exigence de légalité, nécessité et proportionnalité, prévues à l’article 19 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, auquel le Togo a accédé le 30 mars 1988 ».
La Rapporteuse Spéciale se dit très préoccupée par le manque de clarté des décisions de la Haute autorité de l’Audiovisuel et de la Communication (HAAC) quant aux dispositions légales que les journaux mis en cause auraient violées.
La Rapporteuse Spéciale est davantage préoccupée par l’utilisation de la réglementation en vigueur sur la diffamation, qui lorsque celles-ci est n’est par rigoureusement définie, peut être utilisée de manière abusive afin de sanctionner illégalement ou arbitrairement des journalistes et les entraver dans leur mission d’information du public.
Mme Khan demande au gouvernement d’annuler les décisions de suspension et de retrait de récépissé des journaux susmentionnés, de procéder au cas échéant à ce que les journaux obtiennent compensation pour toute violation indue à leur droits, et de leur permettre d’exercer leur liberté d’expression dans le cadre défini par le droit international des droits de l’homme.
Elle se dit profondément préoccupée que les autorités semblent avoir été plus promptes à faire cesser la publication de reportages critiques, plutôt que d’envisager d’ouvrir des enquêtes sur les allégations sérieuses de corruption.
La Rapporteuse Spéciale rappelle que le Comité des droits de l’homme avait formulé des inquiétudes quant à des « restrictions injustifiées de la liberté d’expression, notamment la censure de certains médias par la HAAC dont l’indépendance et les modalités de fonctionnement ont été mises en cause », ainsi que celle de la précédente Rapporteur spéciale sur la situation des défenseurs des droits de l’homme qui, suite à sa visite au Togo en 2014, a rappelé les préoccupations quant au « manque de clarté des principes régissant la procédure de la HAAC et affirme que la HAAC a arbitrairement sanctionné les journalistes dans l’exercice de leur liberté d’expression et d’opinion précédemment formulé par son mandat. Elle encourage à une indépendance de l’autorité de règlementation des médias, « une condition indispensable afin qu’elle puisse exercer son mandat dans la rigueur de la loi et avec la confiance des citoyens ».
Mme Irene Khan n’ pas manqué d’exprimer ses inquiétudes sur les restrictions accrues à la liberté de presse au cours des derniers mois au Togo. Elle demande des clarifications concernant les allégations d’actes d’intimidation contre des journalistes qui nécessitent l’ouverture d’une enquête prompte et approfondie afin que les responsables soient traduits devant la justice et que les journalistes puissent exercer leur travail sans crainte de représailles.