La pandémie de Covid-19 pourrait tuer au moins 300.000 Africains et risquerait de pousser 29 millions de personnes dans l’extrême pauvreté, alerte la Commission économique des Nations Unies pour l’Afrique (CEA).
NEW YORK, USA, le 20 Avril 2020,-/African Media Agency (AMA)/- Dans le meilleur des cas, « il se peut que 300.000 Africains perdent la vie à cause de la maladie », relève l’agence onusienne dans un nouveau rapport sur la pandémie présenté virtuellement vendredi à Addis Abeba (Ethiopie). Ce scénario ‘optimiste’ indique que même avec une « distanciation sociale intense », le continent pourrait voir plus de 122 millions d’infections et 2,3 millions d’hospitalisations.
Dans le pire des cas (aucune intervention), l’Afrique pourrait compter 3,3 millions de décès et 1,2 milliard d’infections, selon le rapport de la CEA.
« Le scénario A est le pire scénario, caractérisé par l’absence d’intervention. Selon ce scénario, le modèle prévoit aussi 22,5 millions d’hospitalisations et 3,3 millions de décès en Afrique cette année », relève l’agence onusienne. Elle insiste sur le fait que les stratégies d’atténuation ciblées sur la distanciation sociale réduisent considérablement la charge des systèmes de santé et le nombre de décès.
En tout cas, ces différentes projections mettent en lumière la vulnérabilité des systèmes de santé africains. « L’Afrique est particulièrement vulnérable car 56% de sa population urbaine est concentrée dans des bidonvilles ou habitations informelles et seulement 34% des ménages africains ont accès à des installations de base pour se laver les mains », a déclaré Vera Songwe, Secrétaire exécutive de la CEA, citée dans le communiqué.
Dans le meilleur des cas, 44 milliards de dollars nécessaires pour les tests
Dans le meilleur des cas, c’est-à-dire l’adoption de mesures d’arrêt de la transmission accompagnées d’une distanciation stricte, près de 44 milliards de dollars seraient nécessaires pour les tests, les équipements de protection individuelle et les traitements, selon le rapport.
Le pire des scénarios (sans aucune mesure d’atténuation) coûterait 446 milliards de dollars et « l’Afrique serait dans l’incapacité de traiter ne serait-ce qu’une fraction du nombre de malades ».
Le coronavirus est arrivé tardivement en Afrique. Mais il s’enracine progressivement sur le continent, avec désormais plus de 18.000 cas de contamination et 942 morts.
Outre ces prévisions préoccupantes sur le plan sanitaire, le Covid-19 pose de gros obstacles à la croissance africaine. Alors que la pandémie continue d’avoir un impact sur les économies en difficulté du continent, la CEA estime que la croissance ralentira de 3,2% à 1,8% dans le meilleur des cas.
Dans le pire des cas, l’agence onusienne prévoit une contraction de l’économie africaine pouvant atteindre 2,6% en 2020. Une façon pour la CEA de rappeler que les coûts économiques de la pandémie sont « plus durs que l’impact direct du Covid-19 ».
« À travers le continent, toutes les économies souffrent du choc soudain sur les économies. La distanciation physique nécessaire pour contenir la pandémie étouffe et noie l’activité économique », a fait valoir Mme Songwe.
Plus largement, la pandémie mondiale va faire plonger au moins 5 à 29 millions de personnes sous le seuil de pauvreté extrême de 1,90 dollar par jour. En outre, les créations annuelles d’emplois formels (qui se chiffrent actuellement à 3,7 millions) devraient diminuer de 1,4 à 5,8%. La CEA prévoit également une augmentation du nombre d’emplois informels et vulnérables (plus de 60% des hommes et près de 75% des femmes travaillent dans le secteur informel en Afrique) et des dépenses à la charge des ménages pauvres et vulnérables.
100 milliards de dollars nécessaires de manière urgente
Par ailleurs, le rapport note que les petites et moyennes entreprises africaines risquent de fermer complètement en l’absence d’un soutien immédiat. En outre, le prix du pétrole, qui représente 40% des exportations africaines, a diminué de moitié et les principales exportations africaines comme les textiles et les fleurs fraîches coupées se sont effondrées. Le tourisme, qui représente jusqu’à 38% du PIB de certains pays africains, a effectivement cessé, tout comme l’industrie du transport aérien qui le soutient.
Face à une telle situation, la CEA estime que 100 milliards de dollars sont nécessaires pour fournir de manière urgente et immédiate un espace budgétaire à tous les pays. Il s’agit de répondre « aux besoins immédiats des filets de sécurité des populations », a ajouté Mme Songwe qui souligne le besoin « d’une assistance sans précédent grâce à des mécanismes de financement innovants ».
« Nous devons rebâtir plus solide, en veillant à être soucieux du climat dans la reconstruction et en tirant parti de l’économie numérique », a-t-elle insisté. Mme Songwe note également que le secteur privé a besoin de liquidités, mais il a également besoin de partenaires. « C’est pourquoi nous appelons la communauté internationale à nous soutenir en injectant plus de liquidités dans nos économies », ajoute-t-elle.
En retour, l’agence onusienne invite les pays africains à s’engager « à mettre en place ou à renforcer les systèmes de lutte contre la corruption et à améliorer la prévisibilité des flux, leur transparence et le respect du principe de responsabilité en la matière ». Cela permettrait aux ministres des finances de planifier valablement les flux de fonds et les acteurs de la société civile de faire le suivi afin que tous ces financements « parviennent rapidement aux personnes qui en ont le plus besoin ».
Distribué par African Media Agency (AMA) pour ONU Info.